Les implications des récents arrêts sur la prescription de l'action en garantie des vices cachés

La question de la prescription de l’action en garantie des vices cachés a été au cœur de plusieurs décisions judiciaires rendues en décembre dernier, apportant des éclaircissements substantiels aux consommateurs et aux commerçants confrontés à des défauts découverts après l’acquisition d’un bien.

Ces décisions, intervenant après la décision de la chambre mixte de la Cour de cassation du 21 juillet 2023, ont mis en lumière diverses problématiques concernant les délais de prescription encadrant les actions en garantie des vices cachés, notamment en matière de litiges entre particuliers, commerçants et fabricants.

Pour rappel, la chambre mixte avait dû répondre à la question de la nature juridique du délai d’action en garantie des vices cachés. Elle avait ainsi retenu que le délai de 2 ans prévu pour intenter une action en garantie des vices cachés d’un bien vendu est un délai de prescription qui peut donc être suspendu, en particulier lorsqu’une mesure d’expertise a été ordonnée, et non un délai de forclusion.

Les différentes chambres de la Cour de cassation ne parvenaient pas non plus à s’accorder sur l’existence ou non d’un délai butoir, et quand bien même ce délai existerait, aucun consensus quant à sa durée n’était possible. La chambre mixte avait ainsi consacré l’existence d’un délai butoir de 20 ans encadrant l’action en garantie des vices cachés.

Pour approfondir davantage la compréhension des enjeux juridiques, découvrez également notre article antérieur sur les recours légaux en cas de vices cachés : « La Cour de cassation vient de trancher le débat controversé du délai de l’action en garantie des vices cachés ».

Clarification des Délais de Prescription dans les Litiges sur les Vices Cachés

Dans une série d’espèces, les tribunaux ont eu à statuer sur la prescription des actions en garantie des vices cachés, clarifiant notamment la temporalité des délais à respecter pour entamer de telles actions.

Dans un cas, un particulier confronté à des dysfonctionnements sur un véhicule a engagé une action en garantie des vices cachés contre son vendeur. Ce dernier appelle en garantie le fabricant, mais se heurte à l’opposition du fabricant qui invoque la prescription de l’action. La Cour de cassation a cassé la décision initiale, précisant que l’action doit être intentée dans les deux ans suivant la découverte du vice, sans excéder un délai maximal de vingt ans à partir de la vente (Cass. 1ʳᵉ civ., 6 déc. 2023, n° 22-23.487, n° 663 D).

La Cour applique ainsi sa jurisprudence de juillet 2023 en ce qu’elle retient que le délai de prescription de l’article L.110-4 du Code de commerce ne constitue plus un délai encadrant l’action en garantie des vices cachés, cette dernière devant être exercée dans les deux ans à compter de la découverte du vice, sans pouvoir dépasser le délai butoir de 20 ans.

Dans un autre cas, lié à des défauts sur un véhicule d’occasion, la Cour a rejeté le pourvoi formé en considérant que la Cour d’appel avait fait une juste application de sa nouvelle jurisprudence en ce qu’elle a retenu que l’article L.110-4 du Code de commerce ne faisait pas obstacle au report du point de départ du délai de prescription à la date de découverte du vice.  (Cass. 1ʳᵉ civ., 6 déc. 2023, n° 21-21.899, n° 659 D).

Suspension et Interruption des Délais de Prescription : Nouvelles Jurisprudences

Les décisions judiciaires ont également établi que le délai biennal pour intenter une action en garantie des vices cachés peut être suspendu. Dans un cas spécifique, une expertise diligentée par l’acheteur a permis de suspendre ce délai jusqu’à la remise du rapport d’expertise (Cass. 1ʳᵉ civ., 6 déc. 2023, n° 22-14.666, n° 660 D).

De même, la Cour de cassation a confirmé que le délai biennal prévu par l’article 1648 du Code civil n’est pas un délai de forclusion, et peut donc être interrompu et suspendu, contrairement à ce qu’avait avancé un concessionnaire dans un litige où il était mis en cause pour des désordres sur un véhicule (Cass. 1ʳᵉ civ., 6 déc. 2023, n° 21-16.908, n° 658 D).

Influence des Procédures Alternatives sur la Prescription des Vices Cachés

Une autre décision notable concerne l’impact des tentatives de conciliation sur la prescription de l’action en garantie des vices cachés. La Cour de cassation a souligné que le dépôt d’une requête en conciliation peut interrompre la prescription, laissant ainsi au juge le soin de vérifier cette interruption dans le cas d’une action en justice (Cass. 1ʳᵉ civ., 6 déc. 2023, n° 22-19.903, n° 650 D).

Il est tout à fait logique de constater que les chambres civiles se conforment à l’interprétation énoncée par la chambre mixte en juillet 2023, et adoptent la récente évolution de la jurisprudence. Deux points essentiels sont appliqués : la nature du délai biennal, qui est de prescription et non de forclusion, et ensuite, l’inapplicabilité du délai de 5 ans prévu pour les actions entre commerçants, au profit du délai de 20 ans énoncé à l’article 2232 du Code civil.  

En conclusion, ces arrêts récents ont apporté des éclaircissements importants quant aux délais, suspensions et interruptions relatifs à la prescription de l’action en garantie des vices cachés. Ils offrent ainsi un cadre plus précis pour les consommateurs et les acteurs économiques confrontés à de tels litiges, renforçant ainsi la protection des droits des acheteurs face aux vices cachés sur les biens acquis.

Synthèse des Décisions Judiciaires Récentes sur la Garantie des Vices Cachés