Chaîne de contrats translatifs de propriété : la transmission de la clause compromissoire

Dans le monde juridique complexe des contrats et des litiges commerciaux, la question de la transmission des clauses d’arbitrage au sein d’une chaîne de contrats translatifs de propriété suscite des débats récurrents. Dans un récent arrêt du 14 février 2024, la Cour de cassation a, de nouveau, clarifié cette problématique, mettant en lumière l’applicabilité d’une clause compromissoire même lorsque celle-ci ne figure que dans le dernier maillon de la chaîne contractuelle.

Analyse de Cas : Dysfonctionnements et Clauses d’Arbitrage dans la Fabrication

Une société fabrique des boîtiers de commande électronique contenant des cartes d’alimentation conçues par une deuxième société, dont les composant sont fournis par une troisième, lesquelles les acquièrent après d’une quatrième société en vertu d’un contrat de distribution comportant une clause compromissoire.

Des dysfonctionnements affectant les cartes d’alimentation fabriquées par la 4e société sont constatés par la 1e société, qui assigne en garantie des vices cachés la 2e société, qui appelle en garantie les société 3 et 4. Ces dernières soulèvent une exception d’incompétence fondée sur l’existence d’une clause compromissoire.

La Cour d’appel se déclare incompétente en application de l’article 1448 du Code de procédure civile.

Dans leur pourvoi, les sociétés 1 et 2 et leur assureur soutiennent que les contrats conclus entre les 3 premières sociétés ne comportent pas de clause d’arbitrage, ce qui rend recevables leurs appels en garantie.

Décision de la Cour de Cassation sur les Clauses d’Arbitrage et Contrats Translatifs

La décision de la Cour de cassation, fondée sur l’article 1448 du Code de procédure civile, rappelle une règle claire : lorsqu’un litige relevant d’une convention d’arbitrage est porté devant une juridiction de l’Etat, celle-ci se déclare incompétente, sauf si le tribunal arbitral n’est pas encore saisi et si la convention d’arbitrage est manifestement nulle ou manifestement inapplicable. La Cour rappelle que cette disposition s’applique également aux contrats translatifs de propriété : la clause compromissoire est transmise de façon automatique en tant qu’accessoire du droit d’action, lui-même accessoire du droit substantiel transmis, sans que le caractère homogène ou hétérogène de cette chaîne ait une incidence.

Bien que la clause compromissoire ne figurait que dans le contrat entre les distributeurs et le fabricant des composants, la Cour a jugé que cette clause était applicable à l’ensemble des parties en cause, y compris celles qui n’avaient pas directement conclu ce contrat.

Transmissibilité de la clause compromissoire

La décision de la Cour de cassation met en lumière un principe important : dans une chaîne de contrats translatifs de propriété, la clause compromissoire est transmise de façon automatique en tant qu’accessoire du droit d’action. Ainsi, même si un contrat spécifique ne contient pas de clause d’arbitrage, cette dernière peut s’appliquer à toute action fondée sur ce contrat si elle est liée à une série de contrats translatifs de propriété.

Cette analyse de la Cour de cassation suit l’approche déjà engagée par la Cour d’appel de Paris dans son arrêt du 26 novembre 2019 dans lequel la Cour d’appel s’était penchée sur la question de la transmission de la clause compromissoire à un assureur non-signataire par le biais de la subrogation. L’affaire impliquait un litige entre un acheteur, un fournisseur de câbles, ainsi qu’un fournisseur de douilles. L’assureur du premier fournisseur avait assigné le deuxième en justice. Une exception d’incompétence avait été soulevée et la Cour d’appel avait jugé que l’assureur du fournisseur de douilles était subrogé dans les droits du fournisseur de câbles, lui permettant de se prévaloir de la clause compromissoire, rappelant que « les effets de la clause compromissoire s’étendent aux parties directement impliquées dans l’exécution du contrat dès lors que leurs situations et leurs activités font présumer qu’elles avaient connaissance de l’existence et de la portée de cette clause ».

La Cour avait même confirmé que la présence d’une clause attributive de juridiction n’empêchait pas la compétence arbitrale pour statuer sur la clause compromissoire. Cette décision confirmait l’extension de la clause compromissoire à une partie non-signataire et la transmission de celle-ci à un assureur subrogé.

Implications Pratiques de la Transmission des Clauses d’Arbitrage pour les Entreprises

Cette décision a des implications importantes pour les acteurs économiques et juridiques. Elle souligne l’importance pour les parties impliquées dans une chaîne de contrats de connaitre et de prendre en compte les clauses d’arbitrage présentes dans les contrats liés, même si elles ne sont pas parties directes à ces contrats. Cela renforce également la prévisibilité et la stabilité dans les relations commerciales en fournissant un cadre clair pour la résolution des litiges. 

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